ARTFRICA !


Groupe 30 Afrique
Réseau inter-africain d’échanges culturels
BP 2801 Dakar RP - Sénégal
Tél/fax : (221) 827.49.77 - 552.73.37
Email : rakatababy@numibia.net
Web : http://www.africinfo.org



Lieux émergents ? Nouveaux territoires ?

L’art a toujours été un espace d’interrogation, de questionnement critique sur l’ordre du monde. Dans quelle mesure les acteurs culturels parviennent-ils à revivifier cette fonction ? Sont-ils les nouveaux précurseurs du rapport aux autres, de la construction de soi ? Aident-ils à poser, à leur manière, les grandes questions de civilisation, en ouvrant à leur façon des pistes alternatives ?

Ainsi était posé le débat lors de la rencontre qui a eu lieu à la Friche Belle de Mai à Marseille en 2002 sur les nouveaux territoires de l’art. Pendant trois jours, l’association Kà« r Cosaan (www.ker-thiossane.com), membre du réseau Artfactories (www.artfactories.net) a reposé le débat dans le contexte africain (Afrique du Sud, Congo, Algérie, Tunisie, Egypte, Kenya, Sénégal) avec une ouverture à des expériences de l’ailleurs (Lettonie, France).
Cet espace de questionnements, d’interrogations ainsi attribué à l’art (à la culture ?), des citoyens se le sont toujours approprié à travers leurs pratiques. La question n’est donc peut-être pas de se demander comment revivifier comme énoncé tantôt, mais plutôt comment continuer à évacuer le goulot d’étranglement que constituent souvent les politiques sociales étouffantes et destructrices qui génèrent des crises sociales des plus aiguà« s dans nos pays dits pauvres, à tort.

Les parcelles de culture

Au Sénégal comme dans la plupart des pays d’Afrique ayant subis la colonisation française , la maison comme lieu d’habitation est aussi appelée « parcelle  ». Espace de vie familiale, mais aussi lieu de passage et d’échanges permanents des habitants avec qui nous partageons le quartier.
En mettant en place ces différents lieux culturels, de Dakar à Cap Town en passant par Oran et le Caire, les acteurs culturels perpétuent ces espaces ouverts à tous où les rapports humains, au-delà de toute considération de créativité, essence supposée de ces lieux, fondent tout un processus d’intégration sociale qui, de surcroît, est non violente. Ces lieux sont donc des parcelles de culture. Des parcelles de vie.
Par cette occupation souvent arbitraire et illégale de l’espace, les acteurs posent, après la parcelle familiale, les fondements du premier lieu pluriel d’échanges de la collectivité ; de la somme de toutes les parcelles familiales dans leur différence, donc leur richesse.

Des lieux de réinvention de la ville ?

En 1998, sur les calendriers imprimés par l’armée sénégalaise, on pouvait lire ceci : ce ne sont pas les pierres qui font une cité, mais les hommes qui la composent. Il manquait juste une conjonction (que) et un adverbe (aussi). La bonne phrase aurait pu donc être : ce ne sont pas que les pierres qui font une cité, mais aussi les hommes qui la composent. Parce que nous ne pouvons ignorer la place capitale de l’architecture dans notre recherche du bien-être. Dans toutes les grandes villes du monde, se développe le phénomène de l’habit spontané, débouchant sur l’errance des jeunes et la précarité du plus grand nombre. De nouveaux citoyens nés de la relation adultérine entre la civilisation de l’argent et la ville, sur le lit méprisant d’une urbanisation des plus sauvages.

Aujourd’hui, après que l’art ait survécu aux multiples étranglements du politique, les espaces culturels, grâce à leur pluridisciplinarité, l’intelligence et la justesse de leurs propos et de leurs actions, sont entrain de réinventer la ville. Les artistes intègrent la donne du cadre de vie dans leur préoccupation et proposent des schémas d’aménagement en adéquation avec les matériaux de leur environnement.

Des lieux de réinvention du rapport aux autres ?

Un digne rapport à l’autre permet une intégration sociale où, pour reprendre l’écrivain créole Edouart Glissant, on peut changer, échanger et rester soi.
Aujourd’hui, malheureusement, comme l’a constaté le peintre et écrivain sénégalais Kan-Si, dans un de ses textes, -JE tue NOUS-.
Dans ces lieux, à tous les stades de préparation et de représentations des créations, la rencontre avec le public est toujours, sinon souvent, un moment de confrontation de ce dernier avec son propre être. Le but étant de les amener dans cette logique où il peut voir l’autre en soi. Un processus vital pour instaurer une relation de confiance.

Des lieux de construction de soi ?

Ces lieux ou parcelles de culture ont survécu à l’étranglement des politiques que grâce à une chose : une dynamique de groupe qui est le résultat de la grande et intelligente acceptation des différences qui l’animent.
Dans ces lieux et espaces culturels, on y gagne pas sa vie. On l’honore.
L’alternatif est toujours apparu, aux yeux de ceux qui ne la vivent pas, comme une solution de précarité. Il nous faut refuser l’institutionnalisation de cette précarité.
Cette rencontre de Dakar a été rendue possible grâce au soutien de la Fondation Ford (bureaux Caire et Nairobi), Africalia, la Fondation Sonatel, Fondation Prince Claus, le Ministère de la culture du Sénégal et de Artfactories.

Oumar

Profession ? cinéaste-artiste-plasticien-installationiste contemporain

« Après avoir flingué la littérature, charcuté le cinéma et ligoté le théâtre, voilà que le petit écran s’attaque à l’art visuel » de l’avis d’un visiteur rencontré à l’exposition internationale de la biennale de Dakar. Juste une tendance ou faut-il craindre une mort annoncée du pinceau au profit de la caméra ? ce choix artistique du comité de sélection n’est-il pas la résultante de ce discours développé à tort sur « Artiste africain contemporain  » ou « artiste tout court  » ? le camp « artiste tout court  » l’ayant apparemment remporté, il était tout à fait logique que ceux à qui est confiée la sélection choisissent en pensant aux galeristes new-yorkais. Parce que « le monde tout court  », c’est aussi là -bas. Le monde du ready-made. Il faut juste que ça sonne et que ça trébuche, Dow Jones et autres CAC 40 feront le reste, sur fond de dollar.
Et si cette analyste était fausse ? et si cet envahissement de l’image dans le champ de l’art visuel n’était que l’engagement de ces cinéastes-artistes-peintres-installationistes à combattre l’abrutissement annoncé de nos citoyens par la télévision ?

Groupe 30


www.dakart.org le site officielle de la Biennale Africaine de l’Art Contemporain.

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Mis à jour le dimanche 6 juin 2004