Les enjeux en Europe de la reconversion du patrimoine industriel en lieux de culture - 2000 - Paris

Rapport de travail - 27 mai 2000 - Mains d’Oeuvres/Paris
Les résultats de cette première séance de travail mettent en avant des enjeux différents sur la reconversion du patrimoine industriel en lieux de culture. Les regards croisés des porteurs de projets, des spécialistes du patrimoine industriel, et des institutionnels apportent chacun des éléments distincts quant à la mutation de ces espaces.

LES ENJEUX EN EUROPE DE LA RECONVERSION DU PATRIMOINE INDUSTRIEL EN LIEUX DE CULTURE - 2000 - PARIS


Lorsque les contenants rencontrent les contenus...

Le XXIème siècle sera davantage un siècle de reconversion que de construction....la ville aujourd’hui s’imagine de plus en plus à partir de ce qui existe. La notion de transformation se retrouve alors au centre des préoccupations urbaines et de la même façon des préoccupations culturelles et sociales.

Depuis une trentaine d’années, les friches industrielles sont devenues à la fois des nouveaux espaces à conserver et à investir...Même si ces sites désertés véhiculent encore des traumatismes locaux et des images obsolètes, on ne peut pas oublier... Ce sont au même titre que les monuments historiques des architectures à sauvegarder. Néanmoins, à la fois leur nombre et la singularité de chacune des friches soulèvent d’une part des difficultés de protection et d’autre part des opportunités de réutilisation et de réaménagement du territoire.

Pendant que les uns recherchent des nouvelles procédures de protection pour ce vaste et riche patrimoine, les autres s’approprient ces friches industrielles qui sont autant d’espaces disponibles, vastes, polyvalents propices au réaménagement en lieux ouverts, véritables fabriques culturelles investies par la jeune création et les jeunes générations. Ces espaces vides font l’objet également d’un vif intérêt de la part des collectivités territoriales dans l’optique d’une redynamisation urbaine.

Ces anciens lieux de production industrielle sont recyclés en espaces de production et de diffusion artistique et culturelle. Par ce biais, en préservant la mémoire sociale et industrielle, notre action souhaite faciliter les échanges et les pratiques culturelles des jeunes générations s’ouvrant aux nouvelles formes d’expressions artistiques, à l’utilisation des nouvelles technologies et à la coopération interculturelle.

Nous avons profité de la présence de représentants de nombreux lieux de culture européens et de la coà¯ncidence de la prochaine Présidence française à l’Union européenne, pour commencer à construire une réflexion :

  • sur les enjeux représentés par le patrimoine industriel pour la jeune création contemporaine, les jeunes générations, les coopérations et les échanges artistiques et culturels entre les villes et régions d’Europe.
  • sur l’engagement de la France et de ses partenaires européens dans une politique et un dispositif technique facilitant la reconversion des friches industrielles et militaires en lieux de culture.

Afin de mutualiser les expériences de chacun autour du démarrage de ce chantier informel sur la reconversion du patrimoine industriel en lieux de culture, nous avons réuni cinq intervenants de différents secteurs culturels :

  • Paul Smith, Sous-Direction de l’Inventaire Général au Ministère de la Culture et de la Communication.
  • Sandy Fitzgerald, directeur du City Arts Centre à Dublin (Irlande)
  • Marko Hren, directeur du Metelkova à Ljubljana (Slovénie)
  • Jean-François Chougnet, Directeur de l’Habitat, Culture et Solidarités au Conseil Régional d’Ile-de-France

Les résultats de cette première séance de travail mettent en avant des enjeux différents sur la reconversion du patrimoine industriel en lieux de culture. Les regards croisés des porteurs de projets, des spécialistes du patrimoine industriel, et des institutionnels apportent chacun des éléments distincts quant à la mutation de ces espaces.


Fazette Bordage

Nous voulons profiter de la coà¯ncidence de la présence de tous les porteurs de projet venant de toute l’Europe et de la future Présidence française à l’Union européenne pour amener une plus grande prise de conscience sur des activités qui se croisent :

  • enjeux de sauvegarder un patrimoine industriel
  • enjeux de le reconvertir en lieux de culture, en espaces artistiques, des espaces qui par les contenus qu’ils portent soulèvent des enjeux artistiques, sociaux et urbains

Nous vous avons réuni pour constituer un premier groupe de travail avec des porteurs de projet de toute l’Europe, des personnes représentants des institutions culturelles nationales et européennes concernant notamment le patrimoine. Le but de cette démarche étant de faire émerger des éléments qui pourraient être pris en compte par la présidence française à l’Union européenne.

Notre première hypothèse serait une aide à l’investissement aux pratiques artistiques et aux enjeux périphériques concernés. Nous avons conscience que ce travail représente un chantier à long terme, mais il est à la mesure de l’ampleur de ces projets, véritable phénomène européen.

Paul Smith, Chercheur à la Sous-Direction du département des études, de la documentation et de l’inventaire

On peut noter d’emblée que je vais parler du patrimoine industriel et non pas des friches industrielles. En effet, même si la notion de friche est plus conviviale, plus rajeunie, rafraîchie, cette notion représente un aspect négatif utilisé par les urbanistes, les aménageurs et porte l’idée d’abandon, et même l’invitation tacite à raser ou à faire redévelopper.
La notion de patrimoine est pour nous tout le contraire, c’est quelque chose à chérir, à étudier, à sauvegarder pour nos enfants, pour la postérité.

Je travaille pour un service au sein de la DAPA dont la direction est actuellement assurée par Monsieur Melot. Ce service a été créé par André Malraux en 1964 et est nommé, in extenso, Inventaire général des monuments et des richesses artistiques.

Depuis 1983, le service est officiellement chargé d’étudier, d’inventorier le patrimoine industriel français ; on peut noter que la cellule du patrimoine industriel mise en place coà¯ncide avec la mise en réseau des centres TransEuropeHalles.

La création de cette cellule du patrimoine industriel est une réponse à une demande sociale, une réponse politique et budgétaire. Cela correspond à l’émergence d’une nouvelle sensibilité ou plutôt d’une inquiétude à l’égard de la disparition très rapide de vestiges matériels de l’industrialisation française : archives papiers, bâtiments, machines. On pensera plus particulièrement aux disparitions qui ont frappé les vestiges des secteurs traditionnels de l’industrie traditionnelle française et particulièrement des secteurs en crise tels que le secteur textile, la sidérurgie, l’extraction du charbon.

L’archéologie industrielle, c’est-à -dire l’étude in situ, sur le terrain de ces vestiges, est née en Angleterre. C’est dans les années 70 que la France commence à s’intéresser à son patrimoine industriel. Cet intérêt correspond à la vague des écomusées (Creusot), et en 1975, à la création de la première association fédératrice nationale, le CILAC, c’est un Comité d’information et de liaison qui organise des colloques sur le patrimoine industriel et publie une revue « l’archéologie industrielle en France  ».

A la différence des pères fondateurs en Angleterre, le mouvement de l’archéologie industrielle en France est davantage inspiré par des historiens, on peut donc penser aux historiens de la technique, Maurice Daumas ou Jacques Paillin au CNAM et des historiens de l’industrie et de l’économie, Denis Bergeron, Denis Woronoff.

On trouve dès la fin des années 70 des architectes, Philippe Robert et Bernard Reichen, qui étaient déjà sensibles aux potentialités morphologiques, spatiales et constructives des grandes usines du XIXème siècle, leur possibilité à accueillir de nouveaux usages et de nouvelles formes de vie économique.

On pense à leur recyclage, leur reconversion ; particulièrement de l’ancienne filature Leblanc à Lille en logements sociaux qui datent de la fin des années 1970, présentée explicitement comme un moyen de conserver et de valoriser le patrimoine industriel.

La mission du service de l’Inventaire général est essentiellement une mission d’accumulation des connaissances, des études et des inventaires sur le terrain ; et ensuite de partage de ces connaissances.

L’Inventaire général depuis 1983 développe différentes démarches méthodologiques pour étudier le patrimoine industriel :

  • une démarche thématique qui essaie d’identifier certains secteurs industriels afin de lancer des enquêtes sur le terrain. Je pense particulièrement à la sidérurgie et au bois du XVIè-XVIIè siècles, au chevalement de mines et à des problématiques de recherches historiques comme l’énergie hydraulique dont on connaît l’importance dans l’industrialisation française.
  • une démarche d’inventaire topographique ou ce qu’on appelle le repérage du patrimoine industriel. On cherche à identifier, à localiser, à documenter photographiquement tous les sites, vestiges de production industrielle qu’ils soient en activité ou non sur un territoire donné. Cela peut être intéressant pour un canton, une ville ou un département.

Ces deux types de démarches, d’opérations de l’Inventaire sont désintéressées. Il s’agit de recherches historiques, de recherches dont l’ambition est d’abord de nature scientifique : amasser en très grand nombre des données sur le patrimoine industriel à ses différentes échelles, et à tout le territoire.

C’est un service public qui met à la disposition de tout public (petit/grand, spécialisé ou non, décideurs ou curieux) par le biais d’une base de données consultable sur minitel ou sur le site du Ministère de la culture et sous forme de belles publications (Images du patrimoine, Les Cahiers du patrimoine) ses informations. On s’est rendu compte que le patrimoine qui est connu, bien photographié, bien présenté au public est déjà un patrimoine dont la sauvegarde est facilitée. Plusieurs cas de figures illustrent des situations où les protections viennent spontanément à la suite des publications de l’Inventaire.

Les travaux de l’Inventaire général relèvent d’une politique patrimoniale globale et participe à l’identification et à la sélection des sites, des bâtiments, des machines qui par leur intérêt public au point de vue de l’histoire ou de l’art mérite une protection au titre des monuments historiques.

La France est un pays riche d’un patrimoine monumental de 40 000 monuments protégés, mais pauvre de 700 monuments industriels seulement y compris les moulins à vent qui témoignent du passé industriel du pays qui pourtant est long et riche.

Les travaux de l’Inventaire général sans y être spécialement orientés sont essentiels à la protection des monuments historiques. Le grand nombre des connaissances comparatives qui émergent de nos recherches permet donc l’identification de l’usine exceptionnelle ou de l’usine exceptionnellement représentative qui mérite d’être préservée comme un monument faisant parti de l’héritage national.

En réalité, ces opérations de repérage sont loin d’être achevées. Ceci dit la préservation du patrimoine industriel ne passe pas seulement par l’arsenal juridique ou plus tôt lourd de la législation de 1913 sur les monuments historiques.

La réutilisation spontanée des espaces industriels, leur reconversion, leur recyclage vers de nouveaux usages, qu’il s’agisse d’usages d’habitation, tertiaires ou culturels, est en fait une histoire déjà ancienne. Un des enseignements quantifiables de nos repérages industriels c’est que les bâtiments industriels connaissent très souvent des changements de fonction et d’occupation.
Ex : à Saint-Ouen, usine de construction mécanique Farco devenue en 1923 une unité de production André Citroà« n
Les cas de figures de changements de fonctions vers des secteurs culturels sont également connus.
à Toulouse, un couvent de bénédictins®filature de coton (révolution)®manufacture de tabac ( 1811)®école des beaux-arts (1892).

Pour les amis, militants, étudiants du patrimoine industriel, cette forme de préservation devenue plus consciente depuis les années 1980, plus raisonnée mais pas du tout négligeable même si en temps que patrimoine on préfère une usine en activité, là on peut penser aux Forges de Syam qui a fait l’objet d’une publication récente où est installée une usine de profilés que l’on peut visiter qui date du début du XIXè siècle. Mais de tels cas sont plutôt rares. L’usine désaffectée figure plus souvent dans nos bases de données.

Deux remarques sur les opérations de recyclage, de reconversion, « adapted re-use  » comme disent les Américains : on ne peut pas les voir que d’un œil favorable sous condition que les usages nouveaux ne cherchent pas à gommer la mémoire tangible de l’ancien usage industriel, ne cherche pas à l’effacer ou à la nier. Et malheureusement les cas de figures de ce genre sont généralement fréquents.

  • A Roubaix, la filature « Motte-Bossut  » est devenue un centre d’archives du monde du travail protégé au titre des monuments historiques en 1978. Seulement, cette reconversion a désindustrialisé son image, on l’a rendue moins lisible.
  • La Friche Belle de Mai, ancienne manufacture de tabac du IInd Empire, a gommé sur le fronton d’un bâtiment l’inscription « Manufacture nationale de tabac  » .

Si les espaces industriels de ce genre par leur volume, leur qualité d’éclairage, leur adaptabilité et flexibilité se prêtent très bien à de nouvelles occupations éphémères ou permanentes par des artistes c’est loin d’être une situation infiniment applicable.

Pour le patrimoine du XXème siècle, cela pose particulièrement des problèmes car l’usine du XXème est quelque chose où l’industriel va moins investir dans le bâtiment, davantage dans les machines, les procédés de production. (Javel, Levallois-Perret, Boulogne-Billancourt)

Les usines tendent aujourd’hui vers ces usines de flux, toutes en machines en tubes, qui se passent très bien de bâtiment.
Pour le patrimoine industriel de ce type, tout aussi important à nos yeux à préserver, à bien documenter, d’autres solutions sont à imaginer.

Fazette Bordage

Vous venez de nous rappeler l’intérêt de préserver en partie ce patrimoine et même si ce n’est pas une solution, comme vous dites, infiniment applicable, je crois qu’il y a tellement d’étendue et de possibilités de bâtiment on voit bien que dans la possible reconversion en lieux de culture dont on parle il y a une possibilité énorme de lieux de culture qui pourraient exister.

On va essayer maintenant sans les confondre de voir là où nos problématiques, nos intérêts se rejoignent.

Sandy Fitzgerald, City Arts Centre, Dublin, Irlande

Pour vous expliquer rapidement la politique du City Arts Centre, je voudrais que chacun d’entre vous change de place avec son voisin, très vite. Cela pour vous montrer, selon ma propre expérience, comment fonctionnent les urbanistes dans les zones urbaines en Irlande. Ils agissent de cette manière, ils demandent aux gens de partir, sans donner de raisons, particulièrement aux personnes ayant des situations précaires, vivant dans des HLM. C’est ce qui se passe en Irlande, en ce qui me concerne : il y a eu beaucoup de changements, une grande confusion ; les gens ne veulent pas s’en aller, s’ils se sont installés là , c’est pour de nombreuses raisons culturelles...Très rarement, les urbanistes ont demandé leur avis à ces gens. Une grande partie de notre travail consiste justement en une intervention artistique, il s’agit de demander aux gens quelles sont leurs attaches culturelles. Les aménageurs décident généralement de changer une route, de fermer un bureau de poste, de créer un centre commercial mais sans respecter l’écosystème du développement humain... Notre travail est justement de respecter un système d’égalité du développement humain, de respecter les relations entre les habitants et leur environnement, leurs habitudes. Toute démolition, toute fermeture, engendrent la peur, les réactions dans une communauté, même s’il s’agit d’un bureau de poste qui n’a que 100 clients. Donc, l’art est une conséquence de la culture, c’est un symbole pour montrer que la culture est ‘’out’’. L’Irlande connaît à l’heure actuelle une période de grande transition, mais les signes sont plus négatifs : il y a beaucoup de problèmes de drogue et de violence chez les jeunes ; c’est un des résultats des urbanistes qui ne pensent pas à la culture, à ce que ça peut engendrer quand ils construisent des routes, quand ils prévoient des plans d’aménagement.

Le City Arts Centre se trouve dans les docklands. Les docks sont actuellement redéveloppés. Nous avons la chance d’être propriétaires de nos bâtiments. Juste pour vous montrer à quel point les choses ont changé, nous avons acheté le lieu pour 260.000 livres irlandaises, et aujourd’hui, il vaut environ 15 millions de livres irlandaises. C’est l’échelle de développement de la ville aujourd’hui. Nous avions le choix entre vendre et empocher l’argent, ou rester où nous sommes ; nous sommes situés dans un des plus vieux quartiers de Dublin, nous avons construit de nombreuses relations avec nos voisins, notre bâtiment constitue un lieu clé dans le développement des docks parce qu’il se trouve juste à l’entrée. Nous avons donc décidé de rester et de monter un plus gros projet. Ce qui est inhabituel pour nous, c’est d’avoir pour partenaire l’église d’à côté. Etant donné que l’Eglise détient pas mal de terrains autour - l’école, un centre communautaire, l’église - , c’est une bonne occasion de mettre en place un projet socio-culturel. Nous savons tous qu’en Irlande aujourd’hui, l’Eglise a plus besoin de nous que nous avons besoin d’elle parce qu’elle connaît une phase de déclin. Ils sont donc très favorables à développer un partenariat et cherchent des résultats sociaux et culturels également. Nous sommes donc en train de monter ce projet de la partie sud des docks. Nous sommes très ambitieux mais il est difficile de se développer dans un cadre non commercial alors qu’autour de nous d’énormes pôles commerciaux sont aménagés. La culture - initiatives culturelles - sont perpétuellement attaquées. Par conséquent, nous ne pouvons pas, symboliquement, en restant ici avec ce projet, faire un constat.

Nous sommes également impliqués dans un projet d’envergure européenne, initié par Malmචen Suède. Il s’agit du projet "Ville du Futur" (City of the Future), qui est en fait développé dans le quartier des docks de Malmà¶. Ce projet réunit cinq villes : Barcelone, Hanovre, Malmà¶, Friburg and Dublin. Nous nous sommes proposés pour ce projet.

Ce qui est important c’est que nous plaçons l’expression artistique et culturelle au centre de ce projet. Nous tenons également beaucoup au développement durable, ce qui veut dire que nous partons de ce qui existe, nous utilisons l’espace, l’infrastructure, l’histoire, nous ne détruisons rien, ce qui est très important. Si l’on détruit ces lieux, le subconscient se fracture et c’est ce que font les urbanistes sans se soucier. Par conséquent, le message que nous essayons de faire passer aux urbanistes, aux décideurs de Dublin, est qu’il faut regarder plus loin pour toute politique d’aménagement. Ce n’est pas le cas à Dublin. Si les urbanistes ne font pas ça, les aspects négatifs qui se font déjà sentir vont continuer à augmenter. Nous essayons donc de construire un modèle qui tiendra compte de tous ces éléments, en commençant par la culture, par la manière dont les gens vivent, et des symboles, c’est-à -dire l’art émanant de cette culture.

Marko Hren, Metelkova, Ljubljana, Slovénie

Tout d’abord, je voudrais présenter la région d’où je viens en termes de culture et de politique. D’après ce qui ressort des rapports d’observateurs des politiques culturelles, c’est que l’héritage de l’art et de la culture indépendants pendant la transition ; avant cette période, les politiques culturelles étaient essentiellement centrées sur la culture institutionnelle, nationale. Il n’y a donc pas vraiment de juste milieu ; aujourd’hui les recommandations sont à la décentralisation de la production culturelle et artistique. Cet héritage se retrouve également dans l’infrastructure de la production artistique. Dans notre cas, en Slovénie, la réponse à ce mouvement, à la fin des années 80, a été la création de réseaux d’artistes. Ainsi, le Metelkova est entré dans le réseau TransEuropeHalles, exemple de lieux pluridisciplinaires (théâtre, artistes cherchant des lieux...) unis dans un projet de reconversion.

La privatisation a constitué le deuxième temps difficile après la période de transition. De nombreux lieux qui servaient comme espaces pour des activités culturelles indépendantes, pour des artistes et acteurs culturels ont souffert de ce phénomène de privatisation. Les espaces dédiés à la culture sont donc devenus plus rares car ils sont retournés à leurs propriétaires privés. Il s’agit d’un nombre important de lieux : pour Ljubljana seulement, plus de 100 ateliers d’artistes ont été repris. D’autre part, les artistes ont besoin de plus en plus d’espaces pour leur créativité ; c’est justement là qu’intervient le processus de Phoenix : l’art et la culture jouent un rôle essentiel dans des situations de crise. D’autre part, pendant la transition, de nombreux nouveaux espaces dans les villes et aux alentours ont été abandonnés, pour deux raisons. C’est d’abord dà » au changement économique de cette période, de nombreuses vieilles usines ont dà » fermer leurs portes, de nombreuses compagnies publiques ont été dissoutes. La plupart de ces lieux restent vides. De plus, de nombreuses casernes sont aussi à l’abandon ou le seront. Ce n’est donc pas un hasard qu’en Slovénie, beaucoup de ces lieux soient reconvertis en lieux de culture. Le secteur de la défense, vu par les gens, correspond à un concept particulier, c’est pourquoi les casernes ont été particulièrement construites dans la deuxième moitié du XXème siècle au cœur des villes, là où se trouve le potentiel militaire, ce qui a engendré de nombreux combats lors des crises récentes.

Aujourd’hui, nous avons un important potentiel d’artistes qui participent au développement des sociétés. Ces sociétés connaissent des difficultés car tout changement est dur, en raison des crises et des conflits qu’elles ont vécus, mais également en raison de la crise économique, comme c’est le cas en Russie, par exemple, en ce moment, et dans d’autres nouveaux Etats indépendants. Il y a donc un large potentiel de cercles artistiques et culturels, dans le sens multidisciplinaire évoqué par Sandy, ainsi que des liens et des implications de plus en plus grands dans la vie locale, communautaire, par le biais d’espaces où les gens peuvent facilement communiquer. Dans le domaine de la défense, la situation est d’autant plus difficile, mais en même temps requiert encore plus de challenge de notre part. Par exemple, si l’on prend l’exemple de l’Albanie et du Kosovo, il n’y avait pas besoin de privatisation pour qu’il y ait un manque de lieux consacrés à la culture. Traditionnellement, dans les années 90, il n’y a pas eu d’espaces où Serbes et Albanais pouvaient exposer, faire des concerts...C’est donc une des principales missions pour les années à venir : créer des espaces où les gens, dans toutes sortes de situations, puissent se réunir et échanger des idées. C’est pourquoi nous avons pensé à renforcer les initiatives avec TransEuropeHalles après la signature du Pacte de stabilité il y a tout juste un an, afin de placer la culture, l’art et l’action sociale au cœur des priorités et des programmes qui vont être mis en place dans la région. Mais dans les premiers jets du Pacte de stabilité, la question de la culture n’était pas mentionnée ; beaucoup de gens des cercles artistiques ont fait du lobbying au niveau multilatéral pour que la culture bénéficie d’un programme. Par conséquent, il existe quelques programmes aujourd’hui, particulièrement sous l’égide du Conseil de l’Europe, qui permettent de faciliter la mise en place de ces programmes et l’appui des initiatives, les ressources humaines dans cette région afin de réunir les gens dans le domaine artistique, et ouvrir des infrastructures pour ces activités. TransEuropeHalles a des ressources dans ce domaine et une grande expérience dans la programmation, dans la création et la gestion de lieux, alors que nous avons plus l’expérience de chercher des lieux dans nos villes, traiter avec les urbanistes et les autorités locales, faire du lobbying, même à Ljubljana, où c’est pourtant assez facile de s’implanter ; certains d’entre vous savent que beaucoup de nos collègues ont des problèmes à trouver des lieux. A mon idée, et c’est également pourquoi nous avons proposé que dans le cadre du programme Mosaà¯c pour les pays d’Europe du sud-est que TransEuropeHalles puisse permettre un partenariat avec les villes où nous savons qu’il y a des initiatives, des artistes souhaitant ouvrir des lieux. Par exemple, nous avons des partenaires à Belgrade ; ce sont des groupes d’artistes, des producteurs qui attendent le moment où un espace leur sera accordé.

Fazette Bordage

Réactions par rapport aux expériences de Sandy Fitzgerald et Marko Hren.
Ces architectures, ces espaces sont vraiment adéquates à des demandes que portent des générations d’artistes qui sont en train de se créer,

  • qui s’inscrivent dans leur temps,
  • qui ont besoin de rencontres avec d’autres artistes de diverses disciplines,
  • qui ont besoin d’avoir des relations avec des gens très différents, des publics,
  • qui trouvent dans ces lieux des moyens d’apprendre, des outils de production, des lieux de ressources, des moyens d’évaluation, de confrontation.
    A travers l’expérience de Marko Hren, on voit bien que de plus en plus de groupes d’artistes, d’acteurs culturels ont envie de s’emparer de ces lieux.

En ce moment, un système informel où les uns et les autres s’entraident est en train de se mettre en place. TransEuropeHalles constitue un outil qui essaie de pouvoir restituer l’expérience des centres qui existent déjà pour qu’ils puissent aider ceux qui ont envie d’exister et qui rencontrent beaucoup de difficultés.

Mais, TransEuropeHalles ne doit pas être le seul partenaire de cette possibilité de récupération d’espace pour de tels types d’objets. C’est pourquoi, il nous a semblé nécessaire de faire appel à des partenaires territoriaux.

Jean-François Chougnet, Directeur à l’Habitat, Culture et Solidarités, Conseil Régional Ile-de-France

Pourquoi les collectivités publiques, je ne parlerai pas au nom de l’Etat, ont-elles eu à l’égard de ce développement, de la réutilisation des friches une attitude un peu ambivalente ?

Le phénomène de développement des friches est à la fois pour une série d’initiatives extrêmement tentantes et en même temps un petit peu préoccupantes, au risque d’ailleurs d’avoir un discours plus nuancé que celui que vous aimeriez parfois entendre d’un soutien absolu.
Pourquoi c’est tentant ? C’est très évident, du point de vue culturel, vous l’avez dit, adéquation avec des nouvelles générations, des nouvelles pratiques, rupture évidemment avec les cloisonnements disciplinaires qui continuent de faire du mal au développement de la vie culturelle ici ou là , mais ce point là vous le connaissez bien donc ce n’est pas celui-ci que je voudrai développer. Les collectivités publiques doivent bien y trouver un intérêt, elles y voient d’autres avantages

Première préoccupation :
La carte dans le cadre de l’objectif 2 de l’Union européenne (les zones en reconversion) est de plus en plus vaste. L’Ile de France a été requalifiée dans le cadre de l’objectif 2 de l’Union européenne comme zone de reconversion, et plus particulièrement les Yvelines et la Seine-Saint-Denis.
Pour les collectivités publiques, cette expérience est tentante en matière d’aménagement urbain, la possibilité de régler, de compenser des discontinuités du territoire. C’est beaucoup plus ce point qui va tenter une collectivité publique que la force d’une pratique culturelle. Une collectivité va raisonner beaucoup plus souvent en aménageur ( ce n’est pas péjoratif, c’est une réalité qui incombe beaucoup au niveau d’une collectivité publique) que sous l’angle de la politique culturelle stricto sensu.

Ce premier élément de réutilisation renvoie à la notion négative de la friche car on a surtout envie que le bâtiment soit réutilisé parfois à n’importe quel prix, il y a des cas assez fréquents de ce type de choses, indépendamment même des bâtiments les plus prestigieux tel la "Motte Bossut" dont on a parlé tout à l’heure ou d’autres exemples.

Deuxième élément :
Dans un certain nombre d’expériences, d’initiatives, il peut y avoir une combinaison assez favorable pour une collectivité publique : une sorte de fusion, de liaison, de coexistence au sein d’un même projet avec une démarche de type patrimoine c’est à dire que l’on conserve et une démarche de type création : on réutilise, on développe la vie culturelle.
Beaucoup de collectivités publiques françaises mais aussi dans d’autres pays ont été amenés à soutenir ce type de projets, enfin on a quelque chose qui peut palier à la politique patrimoniale (argument fort pour les collectivités) et se donner une image de modernité, logique d’image.
Seulement si le projet en reste là , il ne dure bien souvent que le temps de l’inauguration et rarement dans la pérennité.

Troisième raison :
Les équations économiques de la culture sont différentes de celles que l’on pratique. Ces expériences-là sont souvent d’ailleurs des expériences dans lesquelles on n’a pas la même logique du "tout subventionné" bien connu dans le secteur du spectacle vivant et du patrimoine parce que se sont des secteurs traditionnels de la culture institutionnalisée. Dans vos projets, l’équation économique est différente, ce qui va tenter la collectivité publique parce qu’aujourd’hui la culture du bilan certifié, la culture d’exploitation a souvent fait des ravages dans le secteur culturel comme chacun le sait et que le pouvoir des exemples qui ont des recettes propres est souvent extrêmement satisfaisante pour une collectivité locale qui essaie de soutenir un projet local. Cela va être un argument supplémentaire.
C’est cet ensemble d’aspects qui va être tentant aux yeux d’une collectivité publique.

Pourquoi cela pose une série de questions, d’interrogations :
1- d’ordre réglementaire, souvent sous-estimés y compris par les porteurs de projets, peu de collectivités publiques y compris l’Etat qui a commencé une réforme très récente avec le décret du 16 décembre 1999 d’aide publique à des acquisitions foncières, peuvent soutenir une autre collectivité ou un organisme d’intérêt général type loi 1901 à faire des acquisitions.
Le problème d’acquisition est difficile à régler.
Bien souvent, on trouve un paradoxe complexe : même si d’un point de vue urbanistique c’est absurde, une collectivité recevra plus de soutien et de subventions pour acheter un terrain nu pour construire que pour réutiliser intelligemment à l’issu d’une reconversion moins coà »teuse.
En Ile-de-France, on favorise les acquisitions depuis juillet 1999.

2- problème de pérennité : les élus s’attachent à ce que l’argent public investi pour un projet culturel prenne acte pour plusieurs années. Même si cette durée de visibilité n’est pas toujours perçue par le porteur de projet à ce moment. On va lui demander de s’engager sur un nombre d’années très long qui ne colle pas toujours à son échelle du temps.

3- La répartition sur le territoire des friches industrielles est le produit de l’histoire, de la désindustrialisation, de différents facteurs économiques exogènes. La répartition des projets sur le territoire est très handicapante dans une logique de moyen terme.
On se retrouve avec une accumulation de projets potentiels qui vont de surcroît concerner des territoires appauvris car, en perdant l’industrie, ils ont perdu la ressource des taxes professionnelles, tels qu’Aubervilliers, Roubaix où l’on trouve beaucoup de friches industrielles et où la taxe foncière diminue. D’où l’agacement des collectivités publiques d’un trop plein de projets dans des territoires appauvris, ce qui est souvent mal compris par les porteurs de projets qui eux y trouvent un foncier moins cher.
Pas de péréquations possibles de la réutilisation des friches industrielles. C’est une vraie difficulté. Ce qui peut expliquer une frilosité du point de vue des interlocuteurs publics.

4- La recomposition qui se fait par ce biais doit être faite avec une préoccupation nouvelle : une disparition de la politique culturelle innovante dans les centres de grandes mégalopoles. Cette logique fait des centres des espaces culturels très muséifiés, institutionnalisés, patrimonialisés. Parallèlement, les banlieues dégagent une poésie sympathique, encourageante. Mais à long terme (20-30 ans), on risque une catastrophe culturelle avec des centres de mégalopoles morts.

Le système de réhabilitation des friches industrielles est passionnant même s’il ne faut pas le magnifier et en faire une panacée des politiques culturelles.

Le projet idéal pour une collectivité comme la région Ile-de-France est un projet fondé sur l’idée d’une progressivité. Il faut trouver une logique en adéquation avec l’idée d’innovation qui est porté par le projet lui-même. On recherche l’inventivité tout autant sur le plan du montage administratif : tranches logiques de phasage de ce type de montée en puissance du projet, qui serait la seule manière de garantir une pérénité à un projet.


Fazette Bordage

Lancer la discussion :

  • soit pour mettre en avant le type de contenus d’enjeux dont on parle ( lieux vivants, revitalisation)
  • soit faire émerger les difficultés qui existent
  • soit exprimer des idées sur l’utilisation à l’échelle européenne

Discussion

Jorgen Johansen, Multihus Tobaksfabrikken, Esbjerg, Danemark

J’essaye d’avoir une vue d’ensemble sur la préservation des sites industriels et sur le patrimoine. Si l’on regarde au Danemark l’utilisation de ces bâtiments, il y a des musées, des galeries, restaurants, entreprises, magasins, institutions et des espaces dédiés à la culture et la création artistique. Il y a donc toutes sortes d’activités dans ces lieux. Il me semble intéressant de discuter de deux points : que voulons-nous préserver et pour quelles raisons ?, pourquoi est-ce important de créer des centres culturels dans ces lieux ? Il s’agit d’une large discussion lorsque l’on parle de la préservation du patrimoine industriel. Je veux juste insister sur l’importance que ça a pour nous en tant qu’institutions culturelles, ou pourquoi c’est important ?

Question à Sandy Fitzgerald

En ce qui concerne d’une part, la question de la mémoire et de l’identité, et d’autre part, la question de la transformation et de l’intégration, je me demande quel genre de structures avez-vous mis en place dans vos communautés qui leur permettent d’intervenir et de participer aux programmes que vous développez ?

Sandy Fitzgerald

Je pense qu’il faut prendre en compte ce qui existe déjà . C’est le plus important car les communautés, par nature, ont déjà des structures et une voix, une culture et un art. Beaucoup d’institutions, particulièrement, approchent ces communautés comme s’il s’agissait de territoires vierges, ce qui n’est pas le cas. Il y a un écosystème complexe déjà en place ; si vous entrez dans cet espace, c’est comme entrer dans un habitat naturel. C’est la même chose au sein de la communauté : si l’on perturbe ce qui existe en créant un centre culturel, en occupant un lieu dans un but de transformation, préservation, mémoire ou identité, on bouleverse ce qui existe. Il faut donc être extrêmement prudent et bien connaître la communauté et son environnement avant d’intervenir. A Dublin, en ce qui nous concerne, cela fait 12, 13 ans que nous travaillons ; mais nous avons passé les 2 ou 3 premières années à forger des liens, à créer des contacts avec les populations, car nous sommes persuadés que si dès le début il n’y a pas de dialogue, un processus de destruction se met en place. Donc, il faut créer les bases sur une relation égale avec les structures déjà existantes. Ainsi, on parle plus souvent d’intervention dans nos propres communautés.

Eve Nyle, Auteur Littéraire Multimédia

J’interpellerai Sandy Fitzgerald et Marko Hren dans la problématique que vous avez rappelée, Madame, de ces lieux alternatifs qui peuvent être industriels ou militaires et leur place dans le tissu urbain. L’intervention de Monsieur Fitzgerald m’a interpellé dans cette problématique, dans la mesure où ces lieux sont, en fait, dans le tissu urbain des lieux industriels ou militaires qui étaient et sont devenus des lieux alternatifs de rencontre, c’est-à -dire sur un autre mode de création artistique, et à la fois dans un lieu qui est devenu mort mais qui revit, même pour un moment éphémère, et qui pose donc à nous créateurs, parce que je suis créateur, deux questions :
- ces lieux doivent-ils vivre parce qu’ils sont chers ? Dans ces cas-là comment doivent-ils vivre pour avoir la place du créateur dans le tissu socio-économique de plus en plus appauvri comme l’a rappelé le représentant du Conseil Régional de l’Ile-de-France parce que ces territoires, devenus pauvres, sont environnés d’un tissu social où la démarche de l’art doit, à mon avis, aller vers ces gens qui n’ont pas la pratique de la culture.
- ma question pour les deux représentants de la Slovénie et de l’Irlande qui ont l’un et l’autre parlé de ces lieux comme lieu de représentation des artistes, nouveaux lieux d’exposition : Comment ont-ils trouvé ces lieux alors que l’art en Slovénie et dans tous les pays de l’Est était collectif ?
Face au marché qu’est l’art, ils ont trouvé ces lieux pour être représenté, pour se représenter, se rencontrer, créer.
Dans une deuxième partie je m’adresserai au collègue irlandais, quelles sont les méthodes, le processus pour aller vers le public pour maintenir cette démarche socio-économique ?

Réponse de Marko Hren à Eve Nyle

Ouvrir une structure telle que la nôtre, aussi grande (environ 200 hectares), dans le domaine militaire et s’intégrer dans son environnement, sa communauté, est une tâche très difficile, particulièrement dans notre cas. Le projet a commencé avec un soutien important de la population locale en 1989, c’est-à -dire avant la guerre, de manière anonyme : l’énergie et la motivation à faire sortir l’armée de Slovénie étaient grandes. Mais en 1983, nous avons dà » squatter le quartier en raison de la politique locale, ce qui a engendré des circonstances très dures pour les artistes et pour les gens de la caserne, sans électricité, sans eau, souffrant du vandalisme. Je veux seulement dire que nous tous qui voulons créer ce type de centre, connaissons des hauts et des bas, des crises avec les habitants du quartier. Ce fut le cas du Metelkova, qui est aujourd’hui un centre reconnu, mais qui a longtemps eu des relations mouvementées avec la population. Dans notre cas, ça a donc été dur de promouvoir l’idée d’une politique culturelle dans les termes que nous évoquons aujourd’hui.

Valérie Peugeot, Coordinatrice de Mains d’Oeuvres : (réponse à JF Chougnet)

Dans les choses que vous pointiez comme des dangers j’y vois plutôt de très bonnes nouvelles.

Le risque à long terme de voir des centres désertifiés culturellement avec des banlieues hyper riches est une très bonne nouvelle car quand on lit les médias on continue à voir les problèmes sociaux, les banlieues en déserrance... on est loin de basculer dans le sens contraire peut-être danger réel mais on est encore loin d’en arriver là .

Vous avez pointé la contradiction d’ordre économique et financier, on se retrouve dans une situation où les industries partent, la taxe professionnelle diminue au moment où on a une demande de financement de ces lieux. Si on regarde les choses d’un point de vue économique il y a contradiction, mais je crois qu’il faut arrêter de regarder la richesse uniquement d’un point de vue économique. On a vu de façon claire dans les expériences de Sandy et Marko, ces centres culturels sont porteurs de richesse en matière d’imaginaire, d’invention artistique, de création sociale mais aussi en terme de liens sociaux, de développement local, de citoyenneté, de vie communautaire .... Toutes ces richesses là si on se mettait à les comptabiliser on pourrait peut-être commencer à sortir de cette impasse économique on pourrait alors réorienter nos flux financiers publics, tenir compte de ces richesses de manière plus systématiques, et non pas comme seule roue de secours sociale et culturelle, considérées comme des politiques marginales.

Vous nous avez invités à aller par phase, par tranche : en gros, aidez-nous à nous aider ! !

Seulement pour la mise en place d’une grande scène nationale il n’y a pas le souci de phasage... mais c’est une vision de court terme, je vais dire banalité : l’état est en crise, en crise démocratique, besoin de réinventer sa place, coincer entre la mondialisation qui lui enlève ses pouvoirs... et ça fait partie de cette réinvention du rôle de l’Etat que d’arrêter de faire d’en haut mais de faire avec.

Si il y avait un peu moins de phasage avec les projets de ce type, on aurait là une vrai bonne nouvelle.

Jean-François Chougnet, Directeur à l’habitat, culture et solidarité (CR Ile-de-France) (réponse à V Peugeot)

On ne se place pas sur le même niveau. Aujourd’hui, il y a un constat, on se retrouve de par un certain nombre de facteurs très français avec un iatus de court terme. Sur le long terme, qu’il soit aussi inconciliable, je n’ai pas dit ça. Aujourd’hui, dans une collectivité locale qui est confronté à une disparition en spirale dont on a pas idée quand on ne regarde pas les chiffres en détail, c’est vertigineux dans un certain nombre de cas, les collectivités françaises (propres à des petites dimensions) n’ont pas les moyens de rebondir. Dans beaucoup de pays d’Europe, les collectivités publiques locales sont plus vastes, il y a autant de collectivités locales en France que dans le reste de l’Union européenne, la situation française est atypique.

C’est très difficile d’expliquer à des élus ou à des responsables de politique locale que, pour rebondir, il faut réinvestir dans des choses apparemment non rentables. Cela devient très compliqué, on peut le regretter parce que, dans cette contradiction du court terme, ils vont essayer avec le peu d’arguments qu’ils ont de colmater les brèches, ils vont essayer de faire du redéveloppement industriel classique, mais quant à les faire rebondir sur des nouvelles expressions artistiques, attention à ne pas magnifier le processus en disant "on a la solution et vous êtes stupide de pas la prendre".

Sur le troisième point, je ne vais pas défendre l’Etat ou l’attaquer, ce n’est pas mon rôle ici, vous pourrez toujours faire un effet de séance sur les grands travaux qui s’opposent aux petites initiatives locales, on l’a tous fait, ça fait réagir au quart de tour. Avant l’ouverture de Beaubourg, Michel Melot ne me contredira pas, on faisait réagir les artistes, à l’époque, regroupés en syndicat en disant Beaubourg va assécher la vie culturelle locale, parisienne et provinciale. On sait bien qu’il existe des logiques qui s’opposent très facilement et que dans les faits on ne peut pas faire table rase de l’obligation dans laquelle se retrouve une politique culturelle : se trouver, à un certain moment, des signes extrêmement forts qui peuvent être des signes architecturaux, des signes de rayonnement international, alors on peut toujours opposer le microscopique toujours sympathique au très très vaste. Cela ne fait pas avancer le débat. Je ne sens pas tellement ce type de problématique de cette manière là . Centre-périphérie, le gros et le petit c’est des choses auxquelles on est toujours rompu. On peut regretter parfois une adéquation des moyens si on veut faire avancer le débat, il ne va pas être là le problème, il ne va pas être de dire on va prendre de l’argent à l’expo de la Beauté d’Avignon pour le mettre sur tel ou tel élément de telle ou telle friche industrielle.

Il va falloir réfléchir à la manière dont on va être capable de bâtir des projets suffisamment coordonnés, crédibles, concertés pour qu’à côté des gros marchés, vous puissiez faire entendre une logique périphérique qui est sans aucun doute porteur d’avenir.

Gérard Lafargue, Directeur des affaires culturelles de la ville de Saint-Ouen (93)

Nous avons racheté ce lieu pour qu’il devienne ce qu’il a prévu d’être. La mise à disposition des locaux à Usines Ephémères, TransEuropeHalles, Europe 99, cela n’a pas été un choix parce qu’il n’y avait rien d’autre, vu la localisation du bâtiment et vu l’intérêt que porte les investisseurs sur la ville de Saint-Ouen, on aurait très bien pu mettre une autre activité dans ce local. Je pense que cela vient d’un choix d’une collectivité publique. C’est vrai que cela vient en contradiction avec ce que vous dites mais j’ai dà » mal moi-même à me retrouver dans votre intervention. C’est un langage que j’entends chez les institutionnels, je fais, moi-même, parti d’une institution mais je pense que le problème n’est pas là , je vais poursuivre avec l’exemple de Saint-Ouen.

Une usine périphérique Ranxerox : ce sont des investisseurs, installés là depuis dix ans, avec qui on a négocié mais qui sont partis chez les Irlandais pour des raisons de dumping social alors qu’au départ on imaginait pas cela, ils sont partis avec leurs salariés. Pour moi, ce qui fragilise les collectivités publiques ce n’est pas l’implantation des lieux tels que celui-là , c’est aussi la politique de certains grands groupes industriels qui ne voient que leur intérêt immédiat, qui n’ont aucune notion de citoyenneté et qui raisonnent dans une logique libérale. On ferait peut-être bien de se poser les questions autrement.

Et là je vais prendre une casquette de directeur des affaires culturelles, je suis ravi qu’un lieu comme ça s’installe ici. Je ne suis pas un partisan de l’économie libérale, cela va peut-être vous surprendre mais moi je suis ravi qu’à côté du service public de la culture, que je représente en quelques sortes, il y ait un service privé qui existe et qui se mette en place avec des associations à visée citoyenne parce que je crois que cela nous aidera à évoluer. Car si on laisse et continue de laisser aux seules institutions la seule responsabilité de diriger la culture dans ce pays et bien on voit à quoi on aboutit, c’est la fossilisation, excusez-moi, le Ministère de la culture aide les initiatives innovantes quand il lui reste encore des crédits après avoir distribuer tout le reste, ce n’est pas une politique volontariste. C’est de ça que l’on souffre aujourd’hui et c’est une erreur de la part du ministère. On a fait des rencontres entre associations locales et services publics de la ville pour commencer à travailler ensemble, je sens de manière concrète des attitudes qui se modifient chez certains de mes collaborateurs parce qu’au départ il y a eu une inquiétude de voir ces lieux s’installer ici maintenant on sent aussi qu’il y a une concurrence on est plus les seuls dépositaires de l’intervention culturelle, il y en a d’autres, ils font des choses, et si l’on veut toujours exister, il faut aussi qu’on soit là , qu’on se renouvelle et qu’on se remette en cause. Et ça, je trouve cela stimulant, je suis pour la concurrence quelquepart.

La dernière chose que je voudrais dire c’est sur l’économie. Je suis très interrogatif sur l’aspect économique car je ne suis pas persuadé que ce soit une erreur y compris pour une collectivité publique pour un maire que d’implanter un lieu tel que celui-ci dans une commune parce qu’on ne sait pas mesurer l’impact économique aujourd’hui. On sait pour une entreprise parce qu’on a des références, mais sur des lieux tels que celui-ci, il va y avoir quand même une centaine de personnes donc il va y avoir de l’économie engendrée. Il faudrait que l’on travaille sérieusement sur l’impact économique et de développement de ces friches industrielles.

Fabrice Raffin, sociologue

La question du sens de ces initiatives a été rapidement balayée comme une évidence. On a parlé de la multidisciplinarité comme quelque chose d’évident dont on pouvait savoir à priori ce que ça voulait dire. Il faut aller un peu plus loin sur le sens concret des pratiques dont les représentants présents sont porteurs. Rapporté au problème patrimonial, on a bien deux modalités d’intervention sur une politique patrimoniale. Aujourd’hui, dans cette salle, il y a d’un côté des personnes qui disent ce qu’est le patrimoine, qui proposent à partir de leurs critères, ceux qui ont choisi de dire ce qu’est le patrimoine ; et de l’autre côté, des personnes qui entrent dans des espaces, se les approprient et qui ne se posent pas la question directement mais qui vont quand même travailler sur ces espaces. D’un côté, une sorte de muséographie de l’espace, et de l’autre côté, des gens qui font vivre des espaces. On est dans une autre position de relation par rapport au bâtiment ancien qui semble une opposition conflictuelle.

Je voudrais savoir à quel moment ces deux groupes de personnes vont pouvoir se parler et travailler ensemble ?

Tout à l’heure, on nous a dit ce qu’il fallait faire pour être recevable par une collectivité, non, les groupes ont leurs projets, ils ont leur définition de ce qui pour eux représentent l’intérêt culturel, peut-on les laisser faire ?

Sonia Jossifort, porteur de projet

Je représente une association de l’Est parisien, l’association du film court. Nous avons un projet de déménagement avec d’autres structures associatives de l’Est parisien pour trouver un lieu de regroupement. Nous avons conscience que la situation est complexe. La réponse est pourquoi n’iriez-vous pas vous installer en province et en région parisienne, là vous pourriez trouver plus facilement des espaces, ça vous coà »terait moins cher ! !

Peter Sinclair, Chocolate Factory, Londres

Je voudrais intervenir de manière un peu différente ; si l’on parle des sites réhabilités, du point de vue du secteur industriel, je ne pense pas que la reconversion soit une évidence. Les friches industrielles existent bien. Il est important de pouvoir donner accès aux artistes dans ces lieux, d’échanger, de leur redonner une existence, et de redonner vie à la communauté locale. Mais le problème c’est le manque d’infrastructure dans ces lieux. Par exemple, si l’on veut reconvertir un espace en studios d’artistes, il ne suffit pas d’avoir un bâtiment. Il faut qu’il y ait un vrai soutien des institutions et un véritable impact sur la communauté locale, en leur donnant de meilleures opportunités d’emploi, un meilleur niveau de vie..., ce qui ramène la vie dans ces quartiers, ce sont les infrastructures et la population et pas seulement les espaces.

Sabine Schebrak, Wuk, Vienne

Je représente un lieu qui a été squatté en 1981 par un groupe d’artistes, d’activistes, politiciens. Ce fut donc une période décisive en faveur des nouveaux mouvements socio-culturels, ça a également été le cas en Autriche. Mais après un certain temps, ces squatters ont dà » commencer à créer un dialogue avec les autorités publiques, l’administration, le système politique à Vienne, qui n’est pas parmi les plus progressistes d’Europe. Deux mondes totalement différents se sont donc rencontrés. Finalement, le processus s’est mis en place et nous sommes maintenant financés à 80% par la ville de Vienne. Nous sommes un exemple de lieu qui a réussi à allier patrimoine industriel et nouveau mouvement culturel, né dans les années 70 et 80. A mon avis, les centres du réseau TransEuropeHalles sont des symboles car ils démontrent qu’il est possible de mettre en place de nouvelles idées, ce sont des lieux où les artistes font vraiment quelque chose.

Sandy Murden, Journaliste "eyes and ears"

Il nous rappelle la législation de 1982 autour de la réquisition des lieux votée par le Parlement français. A ce propos, il questionne la possibilité de mettre en phase et en face les gens, leurs exigences, les besoins, les urgences. Trouver des solutions aux problèmes de ces lieux là . Problème caricatural au niveau européen autour de ces lieux-là . Il y a à côté des problèmes d’argent, des problèmes de décisions politiques des gens qui travaillent depuis 1983 pour ces lieux vides, pourrait-on trouver des solutions ? Question à Monsieur Chougnet et Monsieur Smith qu’en est-il de la coordination à l’intérieur de leurs institutions pour la mise à disposition de ces lieux ? Où en est-il de cette coordination que nous constatons de vide comme les espaces vides ?

Paul Smith, Chercheur à la Sous-Direction du département des études, de la documentation et de l’inventaire

C’est grâce à des réunions comme celles-ci que l’on noue des contacts, qu’on fait connaissance, et que l’on commence à parler ensemble. Quant à faire réquisitionner des espaces disponibles... Quelles usines protégées ? Je remarque par exemple que la représentation de l’usine par TransEuropeHalles est toujours la toiture en sheds de l’usine du XIXème siècle.

Quels sites industriels faut-il protéger pour, dans un esprit d’archiviste, garder une image fidèle du passé industriel du pays ? Il y va d’un travail de salubrité, d’un travail de mémoire qui corresponde à une demande, un besoin au niveau local, national. Un exemple bien connu, pour revenir à Paris, qui est l’Usine Sudac d’air comprimé qui se trouve sur les quais de la Seine qui est désaffectée et vide depuis de nombreuses années mais qui a été protégée au titre des monuments historiques puisqu’elle a été identifiée comme extrêmement rare et importante, système de production d’air comprimé qui a servi à mouvoir les horloges publiques à Paris à la fin du XIXème siècle, unique sur le plan scientifique. Cet édifice attend, il y a de l’espoir, une occupation de l’Université, mais il y a un rôle pour l’Etat d’identifier une collaboration avec des historiens, des associations, avec d’autres demandes d’identifier les lieux qui doivent être préservés pour la postérité.

Là , la question n’est pas "qu’est ce qu’on peut protéger" mais "ce qu’on doit protéger" en terme de sauvegarde d’archives.

Jean-François Chougnet, Directeur de l’Habitat, Cultures et solidarité (CR Ile-de-France)

Les Usines Sudac ont été protégées autant les murs que les machines, et donc cela pose davantage de problèmes au niveau de ses réutilisations. Conflit d’une logique de protection : à part refaire de l’air comprimé, la réhabilitation n’a pas été facile.

Nicolas Roméas, Directeur de la revue Cassandre

Pour essayer de ne pas trop s’en tenir à des réalités qui soient simplement fonctionnelles, du type "rapport entre les équipes et les institutions"et de se placer du point de vue du sens, il nous faut interroger la raison pour laquelle les questions qui touchent à la place de l’art dans la société contemporaine deviennent centrales. Pourquoi ces questions sont-elles aujourd’hui devenues brà »lantes, partagées par autant de lieux, d’équipes, d’artistes, de responsables de lieux, d’acteurs sociaux, de gens venus d’horizons très différents...
Peut-être, à ce moment de notre réflexion, est-il temps de creuser cette question et de l’élargir...

Qu’est-ce qui est en train de se tramer dans ces lieux de si important, qu’on semble incapable de définir avec précision ? Qu’est-ce que cette nouvelle manière de pratiquer l’art et la culture, qui ne correspond à aucune notion connue, pas même à celle d’avant-garde, et enconre moins à celle de "post-modernisme" ?
Est-elle vraiment nouvelle ? Est-elle fondamentale ? S’agit-il d’une évolution, d’une mutation ? La première réponse c’est qu’au noyau de ces interrogations, avant la question des esthétiques, il y a celle du rapport à l’Autre. Est-ce que, nous qui nous interrogeons sur ces questions aujourd’hui, nous partageons une idée forte, commune de ce noyau actif de la transformation ? Si, en tant que porteur de cette histoire contemporaine des politiques culturelles dans notre pays, on analyse la situation d’un point de vue franco-français, il faut reposer la question à la base. Non seulement, la question des lieux mais de toute une pratique sociétale qui se relie à d’autres aspects de notre vie en société, d’un regard qui tente d’échapper à la conception consumériste et passive des pratiques de l’art.

Nous arrivons dans notre pays à la fin d’un cycle qui est celui de la Décentralisation, et en cette fin de cycle nous sommes en train de produire du même.
Et ce même, naturellement devient de plus en plus vide. On en constate les effets dans la plupart des scènes nationales qui se contentent de faire circuler ce qui a déjà été reconnu ailleurs, sans aucune remise en cause du rapport de l’art. Les premiers emblèmes de la décentralisation théâtrale, les centres dramatiques nationaux avaient pour objet de remettre en circulation les formes artistiques, surtout le théâtre, bien sà »r, dans les déserts culturels des Régions de France, sur la base d’une conception de Démocratisation culturelle qui permettait l’échange et le dialogue.

Dans la plupart des cas, ces bases avancées de la démocratie sont aujourd’hui devenues – d’un point de vue symbolique, d’un point de vue appropriation -, des forteresses inaccessibles, qui permettent une répartition différente des rôles, de celui de l’artiste et de celui du public. Des lieux qui d’une certaine façon, reprennent le relais de cette circulation artistique et culturelle voulue par Dasté, Vilar etc. Mais qu’est-ce qui va se passer de si particulier dans ces lieux ? S’agit-il vraiment d’une autre manière de recevoir, de partager, des pratiques artistiques qui échapperait à une conception devenue très consumériste, élitiste ? Qui remettrait au centre de nos préoccupations l’aller-retour permanent constitutif de notre soif de pratiques culturelles et artistiques fondées sur l’échange ? Qui permettrait cette inter-multi-disciplinarité dans des espaces qui ne sont ni des théâtres ni des musées, ni des centres culturels ou des maisons de la culture au sens ancien ?

C’est cette question de l’échange, de l’implication de chacun au processus d’échange artistique, qui doit être étudié, comprise et considérée comme une priorité, d’un point de vue sociologique, philosophique, politique, ethnologique, en s’extirpant d’une pensée qui serait confinée au ghetto culturel "parisien", et en reliant notre réflexion et nos actions à celle de gens qui sont engagés dans d’autres domaines. Il est impératif de ne pas ratiociner inutilement sur l’esthétique à perte de vue, de ne pas non plus se préoccuper uniquement des moyens financiers alloués à ces pratiques par les institutions nationales ou locales, dans un pays qui conserve, quand même, de très beaux restes en matière de service public de la culture. Tâchons de faire les choses dans l’ordre. Notre priorité absolue doit être, en amont de la chaîne artistico-culturelle, de travailler sur la pensée, sur les symboles partagés, sur les mots employés, tout ce matériel symbolique et conceptuel, qui, en fin de chaîne, sert à choisir les équipes à qui on donnera de la valeur et donc à qui on allouera des fonds à qui, en un mot, on donnera la possibilité de survivre.

Notre priorité absolue doit être, ici et maintenant, de ne pas passer à côté de la question politique, de la question de civilisation soulevée par l’interrogation du sens sociétal de ces pratiques d’échange, qui sont la respiration spirituelle d’une collectivité humaine.

Eve Nyle, Auteur littéraire multimédia

On se confronte à trois logiques :

  • celle de l’Etat qui finance l’art
  • soucis de préserver un tissu social
  • celle du créateur en recherche de lieux, d’un public
    Des lieux alternatifs ont des pratiques sociales différentes de l’art
    La culture est aussi un marché.
    Pourquoi des lieux où l’Etat a investi de l’argent ne pourraient-ils pas être des laboratoires de réflexion socio-économique culturelle de l’art ?
Mis à jour le mardi 6 octobre 2009