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le 6/02/2013 par Couac

#LundiCouac 4 • La culture {dans les / des} quartiers populaires

Quelles réalités ? Quelles transformations ?


Voici une retranscription intégrale de la rencontre organisée le 14 janvier 2013 en partenariat avec l’ADMP, association des directeurs des affaires culturelles de Midi-Pyrénées et avec la collaboration d’ARTfactories/Autr(s)pARTs, à Villeneuve-Tolosane au Majorat (Villeneuve-Tolosane).

Nous remercions Sylvain Noudjingar et toute l’équipe du Majorat pour leur accueil.

L’échange avec les participants s’est décliné en deux temps, après chaque intervention de :
- Elizabeth Auclair, maître de conférence en aménagement à l’université de Cergy-Pontoise, responsable du master « développement culturel et valorisation des patrimoines »
- Salah Amokrane, coprésident du Couac, membre de la commission "culture et quartiers populaires", directeur de l’association Tactikollectif (www.tactikollectif.org)

La prise de son n’étant pas parfaite, quelques interventions sont difficilement audibles. Veuillez nous en excuser.

Merci à Marie-Stéphane Salgas pour sa prise de notes dans laquelle nous avons pioché allégrement et à Adeline Bourdillat pour les photos.

- Mot de bienvenue de Dominica PELLAT, conseillère municipale déléguée à la culture

- Présentations des trois associations : ADMP, Couac et Arffactories, organisatrices de la rencontre

- Présentation rencontre et de la première intervenante, Elizabeth Auclair par David Poncet, DAC de Colomiers.

- Elizabeth Auclair. Intro : La culture dans les quartiers populaires. Période charnière ? Le cadre de la politique de la Ville. Rappel des "Contrats de ville" (financements Etat/Villes). Loi sur la rénovation urbaine (LRU). Inflexion vers une politique "urbaine, architecturale". Des problématiques mises de côté. Période d’évaluation de l’ANRU. Du social au "tout urbain" ? CUCS (Contrats urbains de cohésion sociale). Autres cadres pour faire entrer les projets ? (éducatif, volet urbain...). Violences des démolitions, bouleversement pour les habitants. Et ensuite ? ANRU 2 ? [05:04]

- Elizabeth Auclair. Du côté des politiques culturelles. Période charnière également. "Crise de la cinquantaine" (1959, création du Ministère des affaires culturelles-2009). Crise financière. Relais des collectivités, mais difficultés financières partagées. Ex. Val d’Oise, musée dont le budget est diminué de 70%. Intérêt des structures qui peuvent être rayées de la carte du jour au lendemain ? Problème de sens de ces politiques culturelles. Attention des chercheurs/universitaires sur ces questions. Constat d’échec de la démocratisation culturelle ou n’est-ce jamais fini ? Démocratie culturelle peut remplacer ? Participation, pratiques culturelles des habitants. De nouveaux concepts arrivent : diversité, droits culturels. Quels avantages, paradoxes, ambiguïtés ? Nous appelle à la circonspection. [03:59]

- Elizabeth Auclair. 3 points à aborder. 1/La participation des habitants. 2/les territoires urbains, les espaces publics. 3/les politiques culturelles face à ces nouveaux concepts de diversité culturelle/droits culturels.
1-La participation des habitants. Coquille vide ? Va de l’information à la concertation, co-production, co-constuction... Or, notions de "maîtrise et expertise d’usage" paraissent plus intéressante. Se rappeler, en terme de légitimité, qu’il y a ce troisième acteur (après maître d’ouvrage et maître d’oeuvre). Dans les quartiers "politique de la ville", projets de rénovation urbaine, on oublie souvent les habitants. Avec l’ANRU, logique bottom-up : pour avoir des sous, il faut démolir. Ne pas attendre des interventions extérieures. Nécessité de s’organiser, à la base. Les habitants peuvent aussi se tromper. Donc, besoin d’échanges, de partages, pari d’intelligence collective. Ailleurs, on parle d’empowerment, de community organzing... Capabilités en français. Peu importe les mots, l’enjeu c’est d’arriver à parler aussi des envies des personnes, et pas seulement des besoins. Logique de développement durable oublie un peu la notion de "désirs" ou "besoins spirituels, symboliques".

- Elizabeth Auclair. 2/ Les territoires. Comment favoriser une réelle appropriation des espaces publics, des lieux culturels, par les habitants et les usagers. Nécessite de changer le regard sur ces quartiers, comme patrimoines architecturaux, urbains, habités. "Patrimoine de banlieue" (après avoir parlé de "patrimoine industriel", à présent mieux valorisé). Ex. à Athis Mons, Maison du Patrimoine. Lutter contre la privatisation des espaces. Où se rencontre-t-on à part les centres commerciaux ? A Cergy, c’est les Trois Fontaines. Tendance contre laquelle il faut lutter dans un contexte économique libéral : privatisation des espaces publics et les redonner à la population. Disparition des espaces publics est liée à tendance sécuritaire, qui empêche les populations de se rassembler. Ex, revêtement de sol, université de Tolbiac à Paris (galets ronds pour empêcher les étudiants de s’installer). Grilles, digicodes de plus en plus, qui viennent "normer" les espaces. Les habitants, les usagers ne veulent pas forcément cela. Nécessité de reconquérir ces espaces. Pour vivre et créer ensemble, une notion dont on parle depuis plusieurs années, notamment 2009 avec Elinor Ostrom (cf. article Monde Diplomatique) qui a travaillé sur la gestion des biens communs semble intéressante. Eau, logiciels libres... les patrimoines, la ville, les espaces publics. L’oeuvre de Elinor Ostrom (décédée en 2011) a été très fortement reprise par des acteurs, différents intervenants. Levier pour agir et se réapproprier l’agir. Travailler ensemble pour une gestion commune. On arrive à trouver des formules pour se mettre d’accord et à rapprocher cette notion à la culture, au patrimoine plus globalement...

- Elizabeth Auclair 3/ l’enjeu des politiques culturelles face à ces nouvelles notions de diversité, droits culturels. On a un peu tendance a se jeter sur ces notions ; mais elles prêtent aussi à confusion. C’est aussi une question dinterpretation. Des avantages, mais aussi des pieges. Diversité culturelle est un enjeu important pour ces quartiers : de nombreuses cultures différentes se croisent qui tentent de vivre ensemble. Vrai au niveau des quartiers populaires et au niveau national. Ce sont des idées qui ont fait leur chemin. Déclaration de 2001 sur la diversité culturelle a donné ensuite lieu à une convention de l’expression de la diversité culturelle. Au départ, l’objectif était de protéger les industries culturelles. Défendre le cinéma et l’audiovisuel francophone, pour défendre la langue francaise et maintenir cette diversité culturelle dans les industries cultrelles audiovisuel et cinema. Au-delà de reconnaitre la diversité culturelle, protéger les expressions culturelles des minorités (inuits au Canada, aborigènes d’Australie, etc...). D’où convention de l’Unesco, entrée en vigueur en 2007 sur reconnaissance des pop autochtones. Convention riche mais un peu fourre-tout. Tendance à remplacer d’autres concepts dont la démocratisation culturelle. Renvoie au débat sur "culture pour chacun"... Chacun se débrouille ? Plus besoin des politiques culturelles, des interventions et des finances publiques ? Défense d’une culture universelle et défense d’un accès à l’art.
Diversité culturelle pour favoriser le dialogue entre "les cultures" (plutôt que "la culture"). Nécessite d’ouvrir à une acception plus anthropologique du terme. Avec les échanges internationaux, on est amenés à appréhender les choses un peu autrement. Mais où ça s’arrête si tout est culture. Si gastronomie, jardin potager est culture, il faut penser une autre façon de travailler la culture. C’est comme les agriculteurs à qui on a dit avec la PAC il faut produire avant tout, même si vous mettez des engrais/nitrates, et tout à coup on leur dit qu’ils sont aussi acteurs du développement local et doivent s’ouvrir sur autre chose. Des acteurs/artistes sont peut-être encore fermés dans leur forteresse et bousculés par nouvelles générations de professionnels avec des idées moins arrêtées. Il y a aujourd’hui de nouvelles approches avec designer, architectes, etc, pluridisciplinaire.
Multiculturel, interculturel, transculturel... chaque terme ne répond pas tout à fait à croisement des cultures et défense des identités de chacun. Déclaration de Fribourg 2007, charte composée de 12 articles. Droit individuel ou collectif ? On balance entre les deux. Qu’est-ce qui est imposé à l’individu par le biais des droits collectifs ? Préserver la dignité humaine. Et on dénonce aussi certaines pratiques : excision, polygamie... Mais qui juge ? Les pays occidentaux ? Tout ça est un peu compliqué. Qui peut juger de ce qui est bon et pas bon et pour qui ? Droits culturels sont des textes établis au départ pour des minorités autochtones, c’était important de reconnaître leurs droits fondamentaux mais est-ce transposable partout ? Historiquement, géographiquement peut-on l’appliquer partout ? On dépolitise les choses : on parle de droit culturel et du coup on met de côté les problèmes économiques et sociaux. Il ne faut pas oublier qu’il y a de vraies luttes économiques et sociales et pas seulement culturelles. On parle de protéger les identités de chaque groupe et en même temps de métissage, de créolisation, c’est un peu contradictoire.

- Laure Araguas, chargée de l’action culturelle au sein des bibliothèques municipales de Toulouse. Question sur la maîtrise d’usage.
La notion de maîtrise d’usage vient plutôt de la construction, du bâtiment, de l’architecture. On parle souvent de maîtrise d’ouvrage et de maîtrise d’œuvre. C’est très connu et usuel. A partir de cette réflexion, des architectes et d’autres acteurs culturels ont transposé ça à leurs pratiques... Des architectes ont appris à construire mais ils avaient le sentiment qu’on ne prenait pas en compte le destinataire final. Il s’agit d’architectes de nouvelle génération (en terme de pensée). L’usager sait des choses, il va vivre dans cette maison... Ou usagers d’un service public. Concept qui a intéressé d’autres acteurs... On ne parle pas de "clients" mais de publics. C’est pas très différent foncièrement. On est dans une relation marketing pour faire venir du monde. Un certain nombre d’acteurs souhaitaient arrêter de les appeler des publics. Mais des habitants, des gens. On va les regarder différemment. Pris en tant que personnes avec leurs compétences.
Ex, un collectif Cochenko qui travaille a St. Denis. Tous ces chômeurs ont des compétences en bricolage, en agriculture. Ce collectif travaille avec les habitants. On va travailler ensemble. On apporte nos compétences artistiques.

- Nicky Tremblay, association Dell’arte et coprésidente du Couac.
On ne peut pas parler de la culture sans prendre en compte la situation globale des quartiers et traitement politique depuis 30 ans dans le cadre de la politique de la ville. Il y avait un volet culture mais on a toujours été assignés à du socio culturel et pas culture. Aujourd’hui, il faut vraiment fouiller pour voir un volet culture. On est depuis plus de trente ans malgré les bonnes intentions des ministres de la culture successifs dans un traitement spécifique. Alors que ces territoires ne sont ni des déserts culturels, ni des déserts politiques. La politique de la ville a été annoncée comme une politique provisoire pour impulser des projets innovants en s’appuyant sur la participation des habitants. Aujourd’hui, toujours assignés a la politique de,la ville. Participation des habitants : cela reste de l’information, au mieux, consultation. Il est nécessaire du coup d’avoir de vrais espaces d’échanges et de construction démocratique. Espaces ou on peut accepter la critique, le conflit et le partage du pouvoir. Si les décisions se prennent toujours du même côté, c’est "cause toujours". Habitants sont de plus en plus conscients de cette duperie. Et revendiquent pouvoir d’agir.
- Elizabeth Auclair : sur l’instrumentalisation des arts et de la culture. Il ne faut pas forcément avoir peur de l’instrumentalisation. Tant mieux si les arts et la culture permettent de lutter contre l’exclusion sociale, la réussite éducative. C’est pas forcément à craindre. Mais on peut avoir plus de réticences dans le cadre de projets artistiques menés dans le cadre de démolitions. C’est acheter la paix sociale. L’ANRU débloque des fonds pour aider les habitants à faire le deuil de leur quartier, faire passer la pilule. Instrumentalisation perverse.
- Nicky Tremblay : nous on est vraiment sur développer de l’action culturelle comme outil de transformant sociale. Mais quand ça vient du politique et plaque sur un territoire, c’est autre chose.
- Elizabeth Auclair : développer une politique de droit commun ? Depuis 2000, avec la charte des missions de service public, rendue obligatoire pour les grandes institutions culturelles. Elles ont commencé à le faire parce qu’obligées et aujourd’hui, le font d’une manière plus structurée et intéressante. Lyon, Paris..Louvre. Ça fait partie de leur boulot, des actions sont menées. Ça déstabilise aussi les structures d’éducation populaire qui travaillent avec des bouts de chandelle et sans reconnaissance. D’où l’idée d’arriver à monter des partenariats intéressants sans avoir peur les uns des autres.

- Bruce alary, Dac de Blagnac.
Des positions se radicalisent. Phénomènes prédominants des cultures religieuses. Cultures radicalisées... Quels retours d’expériences ?
- Elizabeth Auclair : Non, c’est pour cela que le thème de droit culturel est ambigu, et personne ne veut financer des études sur ce sujet qui est très polémique. C’est une question hyper importante et la notion de droit culturel doit être prise avec beaucoup d’attention. Réserver les piscines pour hs et femmes bonne idée ? Chacun tâtonne avec ça. Les gens ne veulent pas en parler. Discours œcuménique de façade.

- Elise Morisset, service culturel de Blagnac.
Revenir sur les dérives de l’ANRU. Une déformation de ce qui était au départ. Ex d’un projet d’action culturelle l’année dernière dans le quartier des Baradelles avec l’Usine de Tournefeuille. Présence des artistes habitants sur le territoire. Choquée par les freins rencontrés dans la mise en place du projet par le bailleur social. II gérait ce quartier. Pas de freins budgétaires mais freins concrets pour pouvoir utiliser des locaux vides, communiquer auprès des habitants. La conclusion c’est qu’il y a un pb de communication entre secteur culturel et secteur de la politique du logement, et réelle dérive dans la gestion de société de HLM. Perdent la logique sociale et humaine. Un projet qui avait un sens, avec une expérience artistique très forte, mais s’est fait contre le bailleur social !
- Elizabeth Auclair : un exemple qui va dans ce sens la. Cochenko, témoin d’une réhabilitation qui s’était très mal passée. Personne ne s’occupait des espaces publics laissés en friche. A l’intérieur des appartements, travaux très mal faits. Situation de tension. Ce collectif a décidé d’intervenir sur les espaces extérieurs. Le bailleur voyait ça de manière très récente. Ville a plutôt encouragé presque contre la volonté du bailleur. Et gros problèmes a l’intérieur des logements, la ville a demande au collectif d’investir les,logements. Ont investi un conteneur. Initiations a la fabrication de papiers peints. Bandes, jardins partagés. Le bailleur était très réticent. Des jeunes traînaient... Mais comme ça marchait bien, que Bcq de monde s’est investi. Le bailleur était tout content, et se fait mousser. Il a retourné sa veste. Forme de subversion un peu en douceur. Activisme engagé. Ce collectif revendique cette forme d’activisme parce qu’il faut aller contre certains partenaires qui ne sont pas forcément d’accord...

- Salah Amokrane, directeur du Tactikollectif et coprésident du Couac
Partage des réserves sur l’utilisation de notions sur la diversité et droits culturels. Mais bien utile pour faire valoir une autre vision de ce que peut être la relation culture et quartiers dans le contexte français actuel. Dans le sens aussi de la diversité des origines de la population de ces quartiers. Je suis assez d’accord sur l’analogie à ne pas faire entre les niveaux mondiaux des inuits/aborigènes/etc et droits des populations dans les villes. Mais on a vécu avant ça l’inverse. Il ne pouvait pas y avoir d’autre façon de concevoir l’action culturelle que dans le sens de la démocratisation et dans le sens de l’accès aux œuvres de l’huamnité. Permet de renforcer l’idée de la démocratie culturelle.
Sur les radicalisations. Les choses se radicalisent de toute part. La radicalisation n’est pas seulement du point de vue des habitants de ces quartiers. Mais radicalisation d’une vision de la société française qui désigne ces populations à travers leurs expressions religieuses comme un danger pour l’identité nationale. C’est compliqué. Des gens expriment de ce point de vue là un sentiment d’avoir des difficultés à se reconnaître dans un ensemble parce que à un moment donné, elles sont croyantes et souhaitent se réunir. On est en plein dedans et plein de réponses qu’on n’a pas encore sur la façon dont on va pouvoir avancer. On a une réalité d’une société française qui présente un visage où les musulmans occupent une place en tant que français. Des personnes se demandent comment faire... Dans tous les cas, y’a la face visible, mais à travers la façon dont le débat public est animé sur ce sujet là (de manière cariacturale), on peut aussi penser que la réalité est moins difficile qu’il n’y parait.
- Elizabeth Auclair : On sait aussi les limites de la démocratisation culturelle. Dans la diversité culturelle, les démarches interculturelles en faveur du métissage, de la créolisation (cf. Edouard Glissant), ne pas avoir peur de perdre ces identités propres plutôt que revendiquer droits culturels, utilisés pour revendiquer le droit à la différence. On voit des formes artistiques d’une richesse incroyable. Accepter d’avoir des influences différentes, des identités multiples. Craint que les droits culturels assignent à des identités figées.
- Salah Amokrane : une des vraies pistes pour avancer sur ce sujet là, c’est la question du patrimoine, une des thématiques pour reconsidérer ces sujets. Patrimoine de banlieue, patrimoine de l’immigration.

- André Wittouck Vivre à Tabar . Quartier enclavé, très mixte. A Tabar, nos logeurs mettent systématiquement des barrières quand on veut organiser qqch. Problèmes d’accès à l’emploi. Nous avions un espace de 800 m2, réduit à 80 m2. Les bancs ont disparu... Cela devient de plus en plus compliqué. Notre association est en voie de perdition totale (cf. Journal officiel des Banlieues).

- Sylvain Noudjingar, Dac de Villeneuve-Tolosane.
Les solutions ne viendront pas d’en haut, des institutions. La culture, les habitants la font, les acteurs sont parfois derrière. Ex du Hip Hop qui a une identité propre dans les quartiers populaires en France, qui a dépassé ces questions d’origine. Les institutions culturelles sont venues galoper derrière. Une culture qui a irrigué les pans entiers de la société française : plasticiens, dj. Un bon chemin entre ces questions d’intégration, de communautarisme. La culture se crée au jour le jour par des gens qui vivent ensemble.
- Elizabeth Auclair : On voit aussi autour des gens du voyage, exemple jazz manouche, flamenco, etc des lieux qui mettent en valeur ces musiques, ces cultures, mises en avant, alors qu’au départ, marginalisées.
- Sylvain Noudjingar : Il me semble que l’intérêt du Hip Hop s’est créé sans origine fixe, sans revendication de quelque chose de traditionnel.

pause

- Mélanie Labesse, co-coordinatrice du Couac. Sur la commission culture et quartiers populaires. L’idée de travailler plus précisément sur cette question à défaut d’avoir réussi à la porter au sein des différentes commissions thématiques déjà existantes. Comment des artistes, acteurs culturels, sociaux pouvaient parler de ça. S’est rendu compte qu’il fallait parler de quartiers populaires avant même de parler de culture. Il fallait aborder d’abord les thématiques sociales et économiques. Ce cadre de travail a donné lieu à deux journées d’échanges sur le traitement politique de ces quartiers et de la politique de la ville depuis 30 ans. Il y a besoin de dialogue et les acteurs de ces quartiers ont envie et besoin de dialoguer. Souhait de faire un 2ème temps de discussion qui portera plus sur le traitement médiatique des quartiers populaires et sur les médias associatifs qui peuvent porter la parole de ces quartiers, à cheval entre éducation populaire et expression artistique.
Au sujet de l’échange précédent sur le Hip Hop, le repérage des artistes dans les quartiers populaires est un enjeu et aussi la reconnaissance ; c’est-à-dire à quel moment on fait de la place pour ces cultures dans les centres culturels qui y sont implantés en dehors des 3 ou 4 groupes repérés.

- Salah Amokrane.
Préoccupation, dans la continuité de l’intervention précédente : une des questions pour les acteurs culturels, intervenants… c’est la nature de ces interventions, leur place dans les politiques publiques. Ces dernières années la culture ou l’action culturelle n’était plus une priorité et est devenue qqch de très difficile à faire valoir pour intervenir… On a aussi voulu s’interroger et interpeller les acteurs eux-mêmes. La question importante part du constat que des parties de ville, des secteurs des agglomérations des grandes ou plus moyennes villes sont dans des situations sociales qui mériteraient plus que ce qu’on fait actuellement. Comment faire des quartiers populaires une question prioritaire ? En novembre 2005, on a eu pendant 3 semaines des révoltes dans tout le pays, et si ça ce n’est pas une priorité politique qu’est-ce qui est une priorité politique ? Ne pas oublier qu’il y a dans ces lieux une concentration des problèmes économiques, sociaux, écologiques, etc. La crise économique, dans ces quartiers, cela fait bien longtemps qu’on l’a rencontrée. On s’est posé la question de notre rôle en tant qu’acteur culturel, comment on pouvait interpeller nos collègues sur la façon d’y aller, ce qu’on y fait, comment. Instrumentalisation ou passer d’une logique d’action culturelle à une logique occupationnelle où l’on joue plus le rôle d’agent de loisir.
La question du travail sur la mémoire. Quartiers ≠ déserts culturels, politiques. la situation s’est dégradée. Il s’agit de réactiver des référentiels, rappeler ce qui s’est passé. Actions mémorielles peuvent être un des moyens de retravailler ces éléments de référence. Ces projets permettent de mobiliser l’idée de l’action collective sur les quartiers, outils qui ont pu exister, quand on regarde dans le temps… expression des minorités… dans les années 80/90, on avait de manière hebdomadaire, une émission Mosaïque… sujets sur les populations immigrées. aujourd’hui, on est plutôt sur le versant de la diversité. Plus cette entrée là avec le hip hop comme emblème des quartiers. Le Tactikollectif a travaillé sur cet axe là depuis une dizaine d’années…
Le patrimoine comme bien commun. Une réalité = moins d’associations qui interviennent au quotidien sur les quartiers. on se retrouve dans une situation où il faut remettre au gout du jour ou réactiver des référentiels. Rappeler ce qui s’est passé. Mémoire de l’immigration, mémoire des quartiers populaires. Certaines de ces populations ne le sont plus aujourd’hui mais elles ont produit de la culture depuis 50 ans. Origines Contrôlées : en même temps événement culturel, et démarche… pour patrimoine de l’immigration à partir de l’idée que le patrimoine de l’immigration est un patrimoine de ce pays. Le patrimoine des chansons de l’immigration algérienne. avec un critère pour travailler sur ce répertoire, de chansons écrites et composées en France. Y’a une histoire de l’immigration à raconter…cette histoire là ne peut pas se raconter du point de vue d’en haut mais aussi des premiers concernés. Mettre l’accent sur l’expression des artistes qui sont souvent les chroniqueurs du quotidien. Pas un travail anthologique mais travail à interpréter… l’idée d’un patrimoine qui est bien celui de la France. On en parle pas des "chansons françaises", mais des "chansons de France…"
On a travaillé avec Roland Pousse de la ville de Moissac sur le travail d’un artiste algérien kabyle, Slimane Azem, artiste très important qui a fait toute sa carrière en France, a vendu des centaines de milliers de disques… qui a vécu et qui est enterré à Moissac. Comment on peut inscrire cet artiste dans la mémoire (voir Dossier de présentation de l’hommage à Slimane Azem) de Moissac, avec le territoire, rendre hommage à l’artiste, le faire connaître à la population de Moissac et qu’il y ait une reconnaissance publique même si pas la plus simple mais que la ville de Moissac dédie un lieu à cet artiste. Aujourd’hui, il y a un jardin public dans le périmètre de l’abbatiale qui porte son nom...
Mémoire des luttes : anniversaire des 30 ans des marches pour l’égalité et contre le racisme dans ce pays. Question de l’immigration, question de l’émergence des quartiers dans le débat public. Ne pas faire de la nostalgie à bon compte mais nourrir l’action militante, culturelle de ce qui fait justement la richesse de cette histoire qui lie le Pays à ses banlieues, ses quartiers... Ne pas être juste sur "les droits culturels". On peut s’appuyer sur ce patrimoine là, cette mémoire de la présence et du rôle de ces quartiers. Aujourd’hui on aurait du mal à imaginer qu’on ait après plus d’un mois plus de 100 000 personnes qui marchent pour l’égalité. Richesse de l’histoire qui lie ce pays à ces banlieues. Mémoire sœur de la mémoire ouvrière, même si elles ne se confondent pas et ne sont pas solubles l’une dans l’autre. Il faut avoir l’idée d’une certaine complexité. Ex : les grandes grèves de l’automobile dans les années 80 étaient des grèves ouvrières ou des grèves de l’immigration ? L’idée de réinterpréter, de se réapproprier permet de faire du lien avec l’ensemble de la société.

- Marie Stephane, étudiante. Mémoire et commémoration, deux choses différentes…
- Salah Amokrane : absolument. On voit la multiplication d’actions commémoratives, injonction du devoir de mémoire. Ce travail de mémoire, il a aussi ses travers. Nous ce qui nous a semblé intéressant, c’est l’idée du travail de mémoire collective, davantage que mémoires singulières.

- Roland Pousse, DAC de Muret (ex-Dac de Moissac).
Le mot référentiel est important quand on construit un projet culturel. Préférable à identité… Ce mot va de pair avec l’histoire, mises en perspectives historiques, distinguer patrimoine matériel et immatériel… mais faire se rejoindre les deux dans une mise en perspective historique, c’est aller dans le sens du projet d’action culturelle… Ne devrait-on pas avoir des devoirs culturels ?
- Salah Amokrane : référentiel, c’est faire en sorte d’avoir un vase communicant… comment s’appuyer sur ces lieux de vie, histoires là pour irriguer l’ensemble de l’action culturelle. Il n’y a pas besoin d’avoir des quartiers populaires à Villeneuve Tolosane pour faire un travail de quartier populaire, pour s’appuyer sur ces lieux pour mener un projet, une action, pour faire un travail sur la question de l’immigration. Si on arrive à ça, faire en sorte que la parole des habitants, ou personnes directement concernées par ce récit puissent se retrouver dans le discours universel. La question numéro 1, c’est vivre mieux là où on est et qu’on se sente mieux dans un ensemble… Difficultés, incompréhensions qu’il n’y ait pas de liens entre parties d’une société, d’une ville… plus efficace que des quotas… la diversité elle est pas uniquement d’avoir des noirs, des arabes, la question c’est quoi le discours qu’on porte ?

- Eric Chevance, coordinateur d’ARTfactories/Autre(s)pARTs
Nécessité d’avoir espaces de travail, dont on peut avoir la maitrise complète.
Question de la démocratisation culturelle… inventer, mettre en oeuvre de nvx modes d’action culturelle, s’intéresser à son environnement, au très proche… à l’initiative d’Autreparts, il y a la prise de conscience que chacun des artistes faisaient dans leur coin, AVEC des personnes qui habitaient dans leur environnement. Chacun avait tendance à réinventer des modes d’action, très différents, puisque autre part… mais qqch de central, convictions, valeurs partagées et nécessité de mettre en oeuvre des modalités d’action culturelle différente… Remettre en question la démocratisation culturelle, non pas pour dire que c’était très mauvais mais seulement pas suffisant… l’idée était d’inverser le protocole, on ne souhaitait plus être dans le sens de : les artistes et les oeuvres qui doivent intéresser les personnes mais les personnes, les endroits où elles vivent, etc qui pouvaient intéresser les artistes… Renverser la formule, c’est les gens qui intéressent les artistes. changent les façons d’agir… L’idée n’était pas de remplir les salles d’expo mais comment on induit… aménager des espaces, aménager des moments… comment ce lieu culturel peut prendre du sens, comment on crée qqch de la rencontre, entre des personnes, qui sont d’une part des artistes, d’autre part des gens qui habitent là… les mettre en commun… essayer de développer… pour que chacun puisse s’en saisir. Nécessité d’investir des modes d’interventions culturelles qui n’existaient pas.
Aujourd’hui, modalités d’action mises en oeuvre aussi par institutions culturelles. Pas forcément de la même façon ni avec les mêmes intentions, ni le même engagement. Mais c’est bien de voir que ces idées font leur chemin, parfois derrière les mots, la réalité n’est pas aussi simple… il faut aller plus loin.

- Sandrine Camman (DAC Albi)
Joli travail de mémoire sur Albi y a quelques années. Fait par association sur 2 quartiers, pendant 2 ans avec habitants, récolte d’infos, conteurs, a été l’occasion de liens. Aujourd’hui, dans une société où tension entre les uns et les autres, créer lien social est important pour la ville. Les gens, des habitants du quartier social et quartier historique se sont dit finalement on vit les mêmes expériences et il y a eu rapprochement des populations qui ne l’étaient pas au départ. Importance du patrimoine matériel et immatériel. Patrimoine immatériel est important pour la construction de demain. Il faut développer la relation entre les quartiers centraux et les quartiers péri-urbains. Il faut essayer d’aller vers ce qui nous rassemble plutôt que d’aller sur nos différences.
-  ?
Se construisent aujourd’hui de nouveaux quartiers comme Montaudran, qui sont des îlots qui ne font pas partie de notre patrimoine de ville. Un peu comme mirail il y a quarante ans. Il faut penser à travailler dessus.

- Salah Amokrane. Question intéressante. Avec Borderouge on est dans une conception de l’espace public, avec concentration de population tout d’un coup... pour l’instant, assez mixé, mais vraies questions à se poser. Question se pose avec lien avec quartiers existants. quartier des Izards, les habitants ont le sentiment que Borderouge s’est développé et qu’encore une fois, c’est ailleurs que ca va se passer. c’est parce qu’il y a eu Borderouge qu’on l’a fait… mais en même temps, futur quartier, et constructions pas de très haute qualité. vrai enjeu parce que concurrences de pop, d’habitats. Une agglo comme Toulouse, dès qu’il y a un truc vide, ça bâtît.
Sur l’aspect "la culture qui s’intéresse aux gens et pas l’inverse…" il faut accepter et soutenir l’idée que forcément vu le ENGINE de lieux dont il est question, c’est forcément "revendicatif". Ce qui peut se raconter là, c’est des beaux souvenirs, mais aussi une manière de revendiquer… d’autant plus accepter cette idée là et la soutenir (si on est responsable mairie), distance bienveillante, mais il ne faut pas aller contre, car l’enjeu aujourd’hui c’est quelle option on a devant nous… la vie associative, pas aussi riche qu’elle a été… Education populaire pas aussi présente. C’est quoi l’option ? vous avez pas d’autres options… y’a d’autres options politiques qui sont enfermantes. On est pas en concurrence avec l’action publique mais gens qui défendent des points de vue qui ne vont à personne...

- Mélanie Labesse. Remerciements et annonce prochaine rencontre, le 4 mars "Artistes et historiens, même combat ?"



LIEN : QuARTiers. Les projets participatifs au coeur de la [politique de la] ville.
http://www.artfactories.net/QuARTiers-Les-projets.h (...)
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