RIVE-DE-GIER > DEFRICHE COMPAGNIE > UN ESPACE THÉÂTRAL ENTRE DEUX PÔLES URBAINS - LYLIANE DOS SANTOS


Qu’est-ce qui a poussé Isabelle Mounier à quitter Paris pour Rive-de-Gier (Loire) en 1993 ? La passion du théâtre ? L’irrésistible désir de la partager ? De jouer sur le registre du contemporain ? De laisser une trace plus palpable sur un territoire ? La volonté de cette metteure en scène est d’abord arrimée à l’idée de " défricher " un territoire laissé en jachère, théâtralement parlant, depuis quelques années. Plus rien dès lors ne désactive le mouvement : Défriche Compagnie s’emploie à articuler créations (dix en six ans), lectures-spectacles et action culturelle pour nourrir la pratique en amateur.

La pierre angulaire de tout ce travail, c’est le goà »t du texte. De Marguerite Yourcenar à Fernando Pessoa, de Gaston Bachelard à Antonin Artaud, Isabelle Mounier cherche à la fois à susciter la curiosité auprès d’une grande variété de publics, tout en considérant le théâtre comme une énigme dont la solution (si elle existe) se cherche collectivement. Du côté de Rive-de-Gier, femmes, enfants, adolescents, exclus ou non, sensibles ou indifférents, ont toutes les chances de croiser un moment de théâtre mis en place par la compagnie (au sein des collèges, écoles, lycées, centres sociaux). De dispositifs en contrats, de programmes en conventions, le jeu administratif qui permet aux publics de goà »ter au nectar du verbe doit être habilement mené. La mobilisation des structures, des représentants politiques, des professionnels l’est d’ailleurs tout autant.

Mais, si la construction du futur espace théâtral œuvre à une plus grande intimité avec des publics, elle renforce a contrario l’isolement artistique. Il est parfois difficile de faire venir artistes et professionnels alors que les deux grands pôles urbains de Lyon et Saint-Etienne ne sont qu’à quelques (dizaines de) kilomètres. Mais justement, " il faut se déplacer pour nous " !

L’idée d’ouvrir un lieu où s’opèreraient toutes sortes de rencontres artistiques autour de " l’art vivant " - spectacle vivant, arts plastiques - part de l’absolue nécessité de faire cesser l’éparpillement des forces et de fédérer ces activités dans un seul espace dédié à l’expression contemporaine. Une ancienne imprimerie en friche de 350 m2 au centre-ville de Rive-de-Gier peut se prêter à cette aventure. " Une fabrique de créations, surtout pas un troisième théâtre ! On présentera des travaux en cours en demandant au public d’être actif ", précise Viviane Vendroux, administratrice. " Un lieu où l’on peut centraliser les ateliers, ouvrir les répétitions, favoriser les rencontres, proposer des formations, accueillir des résidences d’artistes ". Pouvoir aller plus loin encore, poursuivre... Question de patience avant de voir cet espace théâtral se matérialiser en une étape culturelle entre Lyon et Saint-Etienne, là où la fertilité du terrain s’est bâtie sur une pugnacité certaine.

Lyliane Dos Santos

Mis à jour le mercredi 26 mars 2003