LES ACTIONS ARTISTIQUES DANS LES CHANTIERS DE RÉNOVATIONS URBAINES - JUIN 2009

Les projets artistiques et culturels inscrits dans le cadre de la politique de la ville relèvent d’une pluralité d’enjeux et d’une multitude de partenaires. Mettre en place les conditions d’une vraie participation des populations et d’une collaboration durable entre organisations partenaires reste une difficulté constante, d’autant qu’aucun dispositif de droit commun n’existe pour ce type de projets.


© Le Jardin Diffus à Marseille – Bruit du Frigo (Bordeaux) – En cours depuis 2006â–ºSYNTHàˆSE COURTE

Privilégier la proximité
La proximité est un maître mot des projets rapportés durant cet atelier. Sans elle, il est impossible de mettre en place une démarche artistique qui prenne réellement en compte les lieux, les partenaires et bien sà »r les habitants à qui elle s’adresse en premier. Quand ils n’y travaillent pas préalablement, les opérateurs culturels et/ou les artistes tendent ainsi à s’installer dans le quartier concerné. La mise en place d’un comité de pilotage vise également à faire se rencontrer les différents porteurs du projet afin qu’ils se tiennent informés de ce qu’ils font et des spécificités de leur domaine d’action. Quant aux habitants, l’enjeu consiste bien sà »r à les faire participer au projet, de sa conception jusqu’à sa restitution finale. La difficulté étant de les intéresser alors qu’ils peuvent avoir d’autres priorités (emploi, logement etc.).

Construire les projets au cas par cas
Dans ce contexte, la légitimité des acteurs culturels et des artistes est une question récurrente, avivée par la confrontation avec les acteurs sociaux, principaux partenaires dans ce type de démarches. Pour y faire face, quelques conditions semblent incontournables : le fait de travailler avec les habitants en les associant à la création (via le collectage de parole par exemple) ; faire venir des acteurs extérieurs au quartier, parfois des artistes de grande renommée ; permettre aux habitants de sortir de leur lieu de vie habituel. Ce sont-là seulement de grandes tendances puisque le « bricolage  » prédomine pour faire de chaque projet un objet singulier. D’autant que de l’avis de tous (même si certains le regrettent lorsqu’il s’agit d’évoquer leur pérennisation), ces projets reposent sur des personnes plutôt que sur des structures. C’est de la bonne ou de la mauvaise rencontre entre elles que dépendent la mise en œuvre et la poursuite de projets. On comprend alors qu’évoquer la possibilité d’un modèle pour des projets de cette nature suscite de vives réactions. © Collectif CulturepreparationCasbahB outaric -Roxanne Gauthier

La délicate relation aux institutions
Les participants à cet atelier témoignent tous de leur position délicate envers les financeurs institutionnels et notamment le ministère de la Culture et de la Communication. Pour ce dernier, le système de labellisation, bien qu’il soit en train d’évoluer, fonctionne encore trop comme l’unique grille d’appréciation pour reconnaître la qualité de projets et les subventionner. Or les démarches évoquées lors de cet atelier entrent difficilement dans les cases institutionnelles puisqu’elles se trouvent au croisement de plusieurs champs (culturel, social, politique de la ville etc.). Deux options s’expriment dans l’assistance : soit il faut rechercher la labellisation tout en s’efforçant de garder sa spécificité, soit il s’agit de chercher à transformer les critères d’évaluation institutionnels en fonction des pratiques plus complexes à l’œuvre au sein des quartiers. Malgré cette opposition, tous les intervenants reconnaissent qu’il faudrait revenir à plus de conventionnements, en tout cas à un soutien financier au long cours adapté à des projets qui eux-mêmes n’ont d’intérêt que s’ils se déroulent sur plusieurs années. Ce qui permettrait de dépasser la culture du résultat (dont le taux de remplissage est la meilleure expression), totalement inadéquate en pareilles circonstances.

© La gare mondiale-Le Melkior Théâtre (Bergerac) - 2008

















Par-delà l’art et la culture
Il apparaît donc urgent pour les membres d’ARTfactories/Autre(s)pARTs de travailler à des propositions de nouveaux modes de conventionnement qui prennent en compte la nécessité d’une approche interministérielle. Les crédits de droit commun font ainsi figure de manne, dont le secteur artistique et culturel ne pourra bénéficier que s’il démontre la portée globale de ses actions. Autrement dit que s’il parvient à faire reconnaître l’utilité sociale et historique des démarches artistiques inscrites dans le cadre de la politique de la ville. D’où l’importance pour ARTfactories /Autre(s)pARTs de se rapprocher d’acteurs évoluant dans le domaine de l’économie sociale et solidaire ou du développement durable où l’on se bat déjà pour imposer d’autres indicateurs (de richesse par exemple) préfigurant un autre modèle de société.

Sébastien Gazeau
Textes rédigés à partir des propos tenus à Dijon les 10 et 11 juin 2009 lors de l’atelier « Démarches artistiques et régénération urbaine  »

Quentin Dulieu (Af/Ap)
Coordination des ateliers de réflexions

Mis à jour le lundi 18 juillet 2011